Métahéros

Art du jeu de société

Attirer, poser le ton, incarner l’univers.

L’illustration n’est pas un simple décor posé après coup : elle est nécessaire pour orienter l’attention et encode des attentes. Puis elle rend l’univers et les personnages tangibles et nous mène à des émotions. On dit souvent qu’elle est complémentaire au texte. Si on applique ce principe au jeu de société, elle est alors aussi complémentaire à l’histoire qu’aux règles.

Petit aparté, en pratique, on flirte avec l’infographie, tant son rôle consiste à mettre en avant des données. Alors la quantité de détails a moins d’importance que sa fonction (repérage, rythme, mémoire), elle peut même être néfaste pour la lecture. Mais on reviendra sur ce point dans un article ultérieur.

Le “premier crochet”, attirer

Boîte & couverture

Elle doit capter l’attention en 2–3 secondes. Le sujet doit être lisible à 1–2 m, sur l’étagère d’un magasin, silhouette claire, promesse de genre (familial, expert, aventure…).

Cartes en main

Elle est censée guider l’œil vers l’info utile (titre, type, coût). L’illustration crée l’envie de jouer la carte, sans masquer ses chiffres.

Poser le ton

La Palette

On pourrait cadrer la palette avec cinq teintes utiles (une dominante d’univers + quatre teintes de fonction : action, ressource, alerte, neutre/structure). Ce cadre est censé organiser la lisibilité.

Côté ambiance, on peut aussi s’appuyer sur des tendances:

  • froides → calcul/gestion
  • chaudes → aventure/interaction
  • désaturées → sérieux/coop

Mais ne vous enfermez surtout pas dedans : feu bleu, glace agressive, arbres rouges… si la lecture gagne, il ne faut pas hésiter. Les dogmes, c’est ennuyeux ; la personnalité enrichit.

Et puis, au final, on adapte ces choix au projet et la décision revient au client, en général un éditeur, car l’illustration est un service avant d’être une interprétation libre.

Le Trait et la texture

On peut théoriser les styles, mais là aussi, mieux vaut relativiser pour ne pas stériliser le jeu. Le style doit servir la lecture et l’intention, et non l’inverse.

Exemple de Tendances (à adapter)
  • Cartoon : accessible, expressif, un peu chaotique ; parfait pour le familial et l’interaction rapide.
  • Encrage dur (traits nets, masses noires) : lisibilité tranchée, tactique/compétitive, bon repérage à distance.
  • Aquarelle : matières souples, atmosphère, contemplation/narratif.

Ceci dit, on devrait choisir le trait (s’il y en a), les couleurs et la texture qui accélèrent la décision à table tout en définissant l’univers. Si c’est lisible et mémorable, on a le bon style.

La Cohérence

Même jeu, mêmes choix plastiques partout (boîte, plateau, cartes, aides). On raconte une seule histoire visuelle.

Incarner l’univers (mémoire & repérage)

Icônes + illustration

Globalement, l’illustration détaillée contextualise, l’icône décide. L’illustration n’explique pas une règle ; elle devrait la rendre mémorisable. Mais là encore, ce principe ne s’applique pas à tous les styles d’illustration. Si on prend mon style personnel. il est souvent tellement minimaliste (cf. l’illustration de couverture de cet article), qu’on pourrait parfois le confondre avec de l’icône.

Rythme

Cette partie entre peut-être dans les considérations personnelles, mais comme c’est mon blog, jevais quand même en parler : selon moi, une illustration devrait alterner les zones riches (pour l’immersion) et les zones muettes (pour la lecture). Plus on respire, plus on comprend.

Règle d’or : si l’illustration accélère la prise de décision et renforce la mémoire des effets, elle sert le jeu. Sinon, elle n’est que du vernis.


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